Alain Nadaud
La mémoire d'Érostrate
1992
Editions du Seuil, 1992
Roman, 256p.
En 356 avant J.C., l’Assemblée des Ephésiens décréta que seraient punis de mort tous ceux qui prononcerait le nom d’Erostrate. Six siècles plus tard, sous l’empereur Gallien, bravant la peste, les pirates, la menace des Goths et la vengeance des dieux, le poète Sextus Publius Galba part sur les traces de celui qui, pour se rendre illustre, avait mis le feu au temple d’Artémis à Ephèse - l’une des sept merveilles du monde.
Tout en relatant dans son poème les péripéties de ce voyage en galère et sans cesser de se livrer à une sorte de méditation infinie sur cette postérité à laquelle l’incendiaire avait tout sacrifié, Sextus Publius Galba entreprend de révéler les noms et les textes de ceux qui, avant lui, au péril de leur vie, osèrent enfreindre l’interdit.
Avec ce livre est enfin brisé l’étonnant mur de silence qui, jusqu’à nos jours, entoura la mémoire d’Erostrate.
Temple d'Artémis à Ephèse
(Source: www.merveilles-du-monde.com)
Articles de presse
"Si Alain Nadaud, qui a 44 ans, et qui ne court pas après les trains, a choisi de situer son cinquième roman dans l'ancienne Asie Mineure, celui-ci ne nous semble pas moins "moderne" que les produits du jour (…) A la façon d'un Roberto Calasso en Italie, Alain Nadaud démontre que les mythes fondateurs de notre culture sont encore apte à nous instruire sur nous-mêmes, à condition de les éclairer de l'intérieur, d'en raviver la fable et, à tous les sens du terme, la flamme…
(…) Le livre nous touche par cette haute exigence, et parce que celle-ci repose sur un dispositif romanesque à grand spectacle.(…) Rien n'est plus plaisant que de saluer la réussite d'un livre ambitieux, en soupçonnant, par surcroît, que Roger Caillois l'aurait aimé."
Pierre Veilletet, Le Nouvel observateur
"Mythe magnifique, cruel destin que celui d'Erostrate, l'homme avide d'éternité et condamné à l'oubli, qui meurt en entendant la terrible sentence, l'obligation au silence, conscient alors de l'inutilité de son crime. Ce mythe, Alain Nadaud le prend en charge admirablement, mais en intellectuel plus qu'en romancier."
Marion Van Renterghem, Le Monde
"Par-delà l'anecdote, le jeu des références fictives, les labyrinthes de l'érudition et du mensonge, par-delà le récit des errances du narrateur, La Mémoire d'Erostrate est une méditation subtile et inquiète sur la nature et le sort de l'œuvre littéraire, sur la quête d'absolu de l'écrivain, son désir farouche d'échapper à l'empire de la contingence et du temps pour se faire reconnaître par la postérité, partant conquérir sa part d'immortalité. Sûr de son art et de ses moyens, Alain Nadaud convie son lecteur à une fête somptueuse où l'intelligence et la culture, l'émotion et l'ironie sont les vrais maîtres de maison."
Bruno de Cessole, Le Figaro
"On songe au merveilleux Pavillon d'or de Mishima – c'est qu'ici comme là ni une flamboyante anecdote ni l'érudition n'étouffent et ne masquent un propos qu'il ne faut pas tout à fait délester de l'énigme qui le fonde. C'est un mystère que nous sommes invités à partager."
Pierre Mertens, Le Soir de Bruxelles
Architexture
En 1991 commence l'aventure de "Quai Voltaire, revue littéraire", qui avait pour objectif d'offrir aux écrivains français contemporains un lieu où ils auraient la possibilité de s'interroger sur les conditions de leur pratique et sur la réception de leurs ouvrages. Commencée par un numéro sur "Les Grands échecs littéraires", cette réflexion se poursuivra par d'autres thèmes, dont un sommaire consacré à la postérité.
Tel sera, parallèlement, le thème central de La Mémoire d'Érostrate qui fait référence à un iconoclaste avant la lettre, le célèbre incendiaire du temple d'Artémis à Éphèse, déesse de la fécondité, elle-même paradoxalement stérile et castratrice.
Se retrouvent donc ici à l'œuvre l'obsession souterraine du matriarcat, telle qu'elle s'était déjà manifestée dans Désert physique, et la violence du ressentiment qu'elle peut engendrer. Car Érostrate est justement ce fils rebelle, qui attente à la toute-puissance de la mère symbolique et est persuadé que la seule force des lettres de son nom, ainsi gravées dans la mémoire des hommes, lui permettra d'accéder à l'immortalité.
Quitte à encourir la peine de mort qui avait été décrétée en représailles, par l'assemblée des cités d'Asie, à l'égard de tous ceux qui prononceraient son nom, ainsi ai-je insinué, à la fin du roman, que je m'inscrivais moi-même dans la filiation de tous ceux que j'avais exhumés pour avoir porté vivante à travers les siècles la mémoire d'Érostrate.
Bibliographie
Les années mortes
(autobiographie)
Alain Nadaud
2004